Jean-Baptiste Amanieu de
Ruat avait des conceptions modernes en matière d'aménagement
rural. D'emblée, il veut fixer les dunes mobiles du Buch et enrichir
les sables par des plantations de pins. Des particuliers le sollicitent
pour obtenir des terres à boiser. Malencontreusement, un bail a fief
nouveau de 1550 avait transféré le domaine utile des vacants aux
communautés du captalat. Le seigneur pouvait bien y concéder des
parcelles, mais seulement à ceux qui les convertiraient en labours.
Passant outre cette réserve, Amanieu de Ruat sema des pins sur les
vacants: on les brûla. Il tenta de poursuivre les incendiaires :
ceux-ci furent relaxés grâce à une adroite défense conduite par le
syndic de la paroisse de La Teste. Ledit syndic était un ayant pins. Il
emporta du coup pour son clan la confiance des habitants.
Après ce premier fiasco, le captal déplaça ses prétentions sur le
terrain des redevances seigneuriales. Son fils François Alain Amanieu
de Ruat, qui lui succède en 1739, poursuit sa stratégie. En 1744, il
fait assigner quelques Testerins en justice pour différents droits
qu'il revendique. Il veut réactiver diverses corvées, contraindre les
propriétaires d'attelages à lui consacrer plusieurs voyages par an,
obliger les sujets du Captalat à lui verser des droits féodaux tombés
en désuétude. Quant a la taxe sur les résines, elle se trouve
renchérie de facto depuis que le poids seigneurial a été
opportunément modifié ( 7 août 1746 )
La résistance s'organise avec efficacité. Les habitants obtiennent
de l'intendant la permission de réunir une assemblée à l'issue d'une
messe paroissiale de 1745. Les ayants pins prennent la tête du
mouvement. La communauté, unanimement, choisit parmi eux ses trois
syndics. Ces privilégiés ne paraissent ils pas les mieux placés pour
amener le captal à composer . Ils n'ont guère à lui envier sur le
plan de la fortune et disposent à Bordeaux d'influentes relations au
parlement. En fait, une telle délégation de pouvoir se révélera
funeste : les bons notables feront certes plier le captal, mais à leur
profit.
Le 7 août 1746, renonçant à un long et ruineux procès, les deux
parties transigent. Les propriétaires de la montagne seront les
premiers bénéficiaires de l'accord. Le droit de "gemaire",
tout d'abord, revient à 12 sols 6 deniers; Le captal reconnaît aux
ayants pins l'entière propriété du domaine utile, ne se réservant, a
titre seigneurial, que le domaine direct. Il se départ, en leur faveur,
du droit de pacage dans les bois ou de la faculté qu'exerçaient ses
prédécesseurs.
PAGE 197 Histoire de la forêt landaise Jacques Sargos Bibliothèque
municipale d'Arcachon